Posté le 7 janvier 2025
L’article L1237-1-1 du code du travail crée une présomption de démission en cas d’absence injustifiée. Mais cette présomption peut être renversée dans le cadre d’une procédure. Le décret du 17 avril 2023 précise la procédure et ses conditions de mise en œuvre. Un Q/R (Questions Réponses) complète le dispositif, étant rappelé que ce Q/R n’a aucune valeur légale.
L’absence injustifiée était auparavant une cause de licenciement pour faute grave qui par définition ouvre droit aux allocations chômage. La réforme a pour objet de mettre un terme à cette pratique de salariés quittant volontairement leur emploi dans le cadre d’un abandon de poste et ainsi bénéficier des allocations chômage.
En cas d’absence injustifiée, l’employeur met en demeure le salarié par LRAR de justifier de son absence ou reprendre son travail dans un délai minimum de 15 jours à compter de la présentation de la lettre.
Dans le même temps, l’entreprise pendant la période d’absence suspend le paiement du salaire pour la période correspondante.
A défaut de reprendre le travail dans ledit délai, le salarié est présumé avoir démissionné de son poste de travail. L’entreprise est alors fondée à remettre au salarié ses documents de fin de contrat.
Le salarié peut aussi informer l’employeur des raisons le poussant à ne pas être présent au travail. Dans cette hypothèse, l’entreprise ne peut pas poursuivre la procédure.
Le salarié peut néanmoins contester cette « démission » en saisissant le Conseil de Prud’hommes à l’encontre de l’employeur. Le Conseil statue en procédure accélérée sans conciliation. Le dossier est porté directement devant le bureau de jugement, le Conseil devant statuer dans un délai d’un mois.
Le Conseil de Prud’hommes doit indiquer si à son sens la démission est valable ou non.
Si le Conseil estime que la démission est valable, alors l’ancien salarié ne bénéficie pas des allocations chômage et l’entreprise n’a rien à régler.
Au contraire, si le Conseil estime que la démission n’est pas valable alors, cette situation s’analysera nécessairement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et le Conseil condamnera l’employeur à payer au salarié :
Au vu de la décision du Conseil de Prud’hommes, dès que la rupture s’analyse désormais en licenciement, le salarié pourra aussi obtenir de POLE EMPLOI des allocations chômage.
L’on voit ainsi que la mise en place et l’utilisation de cette nouvelle disposition peut faire peser un risque conséquent sur les entreprises.
De manière usuelle, la Cour de Cassation estime qu’un salarié est fondé à prendre acte de la rupture de son contrat de travail en cas de relation dégradée, harcèlement moral ou sexuel, manquement à l’obligation de sécurité, non-paiement du salaire ou non-paiement des heures supplémentaires etc…
L’on peut penser que la jurisprudence adoptera des solutions identiques pour remettre en cause la « présomption de démission ».
Se pose légitimement la question de savoir si l’application de cette réforme est obligatoire, ou conseillée.
Trois éléments permettent de dire que l’application de la réforme n’est pas obligatoire :
A – L’absence doit être volontaire.
La procédure ne peut être mise en œuvre que si l’absence du salarié est « volontaire ». Article L1237-1-1 du code du travail. L’employeur ne peut avoir aucune certitude à cet égard.
B – Le décret du 17 avril 2023 crée l’article R1237-13 lequel précise : « L’employeur qui constate que le salarié a abandonné son poste et entend faire valoir la présomption de démission » Cette rédaction implique que l’employeur peut faire valoir ou non la présomption de démission. Le suivi de cette procédure n’est donc pas obligatoire.
C – A aucun moment les nouveaux textes du code du travail n’interdisent le licenciement pour absence injustifiée.
Le Conseil d’Etat selon arrêt du 18 décembre 2024 apporte des précisions sur les mentions devant figurer obligatoirement dans la lettre de mise en demeure.
Cette lettre doit prévoir :
A – Le délai de 15 jours minimum à compter de la première présentation de la lettre de mise en demeure.
B – Du fait qu’en l’absence de reprise du travail et/ou absence de justification de l’absence le salarié sera présumé démissionnaire son contrat de travail étant rompu sans autre formalité.
Il peut être prudent d’y rajouter que ce mode de rupture conduit à une absence de possibilité de bénéficier des allocations chômage et est privatif de toute indemnité.
De ce fait, avant d’utiliser la présomption de démission prévue par l’article L1237-1-1 du code du travail l’entreprise devra vérifier l’absence de tout litige potentiel avec le salarié, et la certitude que l’absence est bien « volontaire ». Et respecter à la lettre la procédure.
En cas de doute, la mise en place d’un licenciement pour faute grave restera une solution adaptée pour l’entreprise car nécessairement plus sécurisée.